Retour sur l’exposition de Bernard DELAVAL,
« De Teintes et d’OR »
- Vos sculptures semblent prendre vie, s’animer et se mettre en mouvement : comment apprendre à regarder différemment la matière pour voir les formes potentielles qui sont cachées à l’intérieur ?
C ‘est par le regard d ‘autrui que mes sculptures prennent vie. Lorsque l ‘on regarde »L’ours » de cet immense artiste figuratif que fut François Pompon il est difficile d’y voir autre chose que l’ours créé par Pompon. Mais nos regards lui donnent vie et mouvement. En regardant une sculpture abstraite, malgré un titre évocateur, vous avez la liberté d ‘y voir tout autre chose passant par votre esprit… (et pourquoi pas un ours !)
En découvrant mon exposition, vous pourrez capter mon »message » caché à l’intérieur … ou bien celui caché dans votre intérieur !
- Le travail d’artisanat est un travail lié au temps ; temps pour faire le projet, temps pour le modelage, temps pour la décoration, Quel est pour vous le temps et le processus de réalisation des oeuvres ?
Pour moi les séquences du temps n’existent plus. Il n ‘y a ni horaire, ni programme établi. Le temps de le création mène toute la vie, il est présent à tout instant. De même que l’outil n’a pas »son » temps, il est juste au service de la créativité.
Comme pour tout artiste, préparer les supports, clouter une toile, affûter les gouges tous ces gestes artisanaux se mettent au service de la création. L ‘outil qui oblige l’artisan est guidé par la technique ; l’artiste oblige l’outil.
- Comment est née votre passion pour la technique de la dorure, et comment vous avez commencé à réaliser des oeuvres artistiques ?
L’or est magique, il me fascine mais c’est un imposteur, il paraît être masse alors qu’il n’est que feuille. Et il kidnappe la lumière (Yves Klein ou Gustav Klimt l’ont su bien avant moi).
Grand admirateur de Pierre Soulages, je me suis souvent demandé comment le noir l’avait condamné à sa prison »dorée » : c’est parce qu’il avait apprivoisé le pouvoir que le noir exerçait sur la lumière.
Après avoir travaillé l’or sur le bois, le métal et la résine, la terre modelée s’est imposée car elle a été mon premier mode d’expression : dès mon enfance j’ai tripoté cette matière.
- Comment organisez-vous le processus de création dans votre atelier ? Que représente cet espace pour vous ?
C’est dans mon atelier de Lancharre, en Bourgogne, qui m ‘a servi 40 ans à la restauration d’œuvres historiques, que je me sens le mieux pour laisser filer mes impressions, mes sensations, pour les matérialiser dans l ‘argile, puis tenter d’y capturer la lumière par l’or et les pigments colorés.
Tout commence par l’imagination traduite succinctement sur de rapides esquisses (aides mémoires de l ‘idée de départ). Puis vient la réalisation : le modelage et la sculpture, la recherche d’une forme harmonieuse qui capturera la lumière par l’or et la couleur. Ces étapes successives se lient au service de ma création.
