Retour sur l’exposition de NKL – Nicolas Badout,
« dans la joie et la bonne humeur. »
- L’exposition « dans la joie et la bonne humeur. » propose une vision sur l’avenir des hommes : quel est le pouvoir de l’ironie de de la satire face aux problèmes urgents du monde ?
La dérision, l’humour, sont pour moi des moyens de survie.
Depuis ma naissance, il y a 30 ans, j’ai pris l’habitude de voir l’état du monde autour de moi empirer : entre les crises financières mondiales, les guerres, les attentats, la dégradation de l’Etat-providence, la montée des fascismes en France mais dans le monde aussi, les pandémies… sans parler de notre plus grave problème à ce jour, la crise climatique, dont nous voyons déjà les effets concrets depuis plusieurs années, quoiqu’en dise un certain Président. J’ai grandi en sachant que chaque jour qui passe serait moins pire que le lendemain.
C’est pour cela que j’ai engagé cette série de toiles pour cette exposition : j’avais envie de parler au public de notre monde, de ses problèmes, de notre finitude, mais aussi et surtout de notre humanité, de nos travers et de nos qualités. Et l’ironie et la satire me permettent à la fois de faire marrer les gens (je l’espère !) mais aussi de transmettre un message, qu’il faut arrêter de se prendre trop au sérieux mais plutôt s’occuper du monde qui nous entoure, arrêter de le mutiler sous couvert d’enrichissement et confort personnels.
C’est en cela que l’humour, langage universel, peut amener chacun d’entre nous à reconsidérer les choses et nos rapports. Les images que je propose sont ainsi parfois badines, parfois violentes, mais j’assume, car c’est le reflet de notre monde.
- Dans tes travaux on voit souvent des paysages post-apocalyptiques, bâtiments et immeubles transformés par l’action humaine. Quel est le rapport entre la vie des individus et la ville où ils vivent ?
J’aime montrer ce qu’on ne pourra plus voir. Plus voir parce qu’on ne sera plus là, individuellement car à un moment notre vie s’arrête et continue autour de nous ; et collectivement car avec la crise climatique tous les scénarios sont possibles : fin de l’humanité, survie précaire des derniers représentants de notre espèce en sous-sol, ou bien un scénario hollywoodien où l’humanité parvient à fuir la Terre à bord d’un vaisseau spatial !
L’humanité façonne les villes, les bâtiments, et finalement c’est ce qui restera de nous, de manière quasi intacte ou partielle, enfoui sous la poussière que des archéologues du futur excaveront. Quelle trace laisserons-nous ?
- Tes images proposent plusieurs références à l’actualité : où trouves-tu l’inspiration, et quelle est ta méthode de recherche ?
Pour imaginer mes toiles, je me base sur mon quotidien. C’est-à-dire que, comme tout le monde, je consulte des sites d’information, je scrolle sur les réseaux sociaux, comme tout le monde, je regarde des films sur les plateformes de streaming, comme tout le monde, je vais sur Wikipedia, j’achète en ligne, etc. Ce sont finalement ces expériences banales qui sont pour moi des inspirations. J’y trouve : des nouvelles terribles, des mèmes internet, des images et photos bouleversantes, crades, sensuelles, gores, magnifiques. A cela, je couple une observation de notre monde : je lève la tête de mon smartphone et je regarde autour de moi. La beauté des gens, des paysages, de la ville, de la nature. C’est tout cela qui fait ma base de travail et c’est en ce sens que mes toiles sont justes des reflets de notre monde.
A la fin je compile des photos et réalise ensuite des montages numériques, qui sont des esquisses pour mes toiles, en associant diverses images entre elles.